Depuis la création du sommet du G20 des Jeunes Entrepreneurs en 2010, la délégation française, représentée par Citizen Entrepreneurs, propose chaque année au Gouvernement une liste de propositions pour stimuler la croissance, encourager l’innovation et favoriser la création d’emplois. La très grande majorité de ces propositions ont fait l’objet de lois, de débats et d’engagements de la part des gouvernements successifs.
La délégation française cette année était composée de 34 entrepreneurs – dont les 3/4 des entrepreneurs ont moins de 40 ans – représente l’écosystème entrepreneurial français dans sa diversité (1/4 de femmes entrepreneures), sa répartition géographique (45% issus des territoires), ses secteurs d’activité (45% travaillant dans le digital) et sa vision globale (52% ont des activités à l’international). A l’issue du Sommet de Berlin, les entrepreneurs français ont rédigé 5 recommandations destinées au gouvernement français.
Ce lundi 20 novembre, les 5 propositions ont été présentées lors de la conférence par les deux sherpas de la délégation française du G20 des Jeunes Entrepreneurs 2017 : Émilie Legoff, Présidente co-fondatrice de TROOPS et Ronan Pelloux, Président co-fondateur de CREADS. Ces recommandations ont en même temps été transmises au Ministère de l’Economie.
Ci-dessous les dites-recommandations plus en détail :
1/ Faire entrer l’enseignement dans la réalité du 21e siècle, celle de l’innovation, du numérique et de la mondialisation
Constat : même s’il y a eu des progrès, le décalage de l’Education nationale et du monde d’aujourd’hui est encore trop important. Il est fondamental de remettre en phase les enseignants avec la vie économique en dehors de la fonction publique.
- Dès la maternelle: donner confiance aux élèves en les entraînant à prendre la parole en public avec l’aide de supports digitaux et les familiariser avec l’apprentissage du codage et des langues en plus de ceux de la lecture et du calcul
- Dispenser certains cours uniquement en anglais pour que la France devienne une nation tournée vers l’international
- Créer un bac N, comme numérique. A côté des disciplines communes aux autres filières (français, mathématiques, langues) enseigner des matières consacrées à des cours de programmation, des décryptages d’innovations technologiques (IA, blockchain, etc.), des modules sur l’entrepreneuriat et l’économie numérique.
- Continuer à faire entrer l’entreprise dans l’école en encourageant les témoignages pour créer plus de vocations d’entrepreneurs.
- Eduquer les politiques au fonctionnement d’une entreprise et proposer des immersions en entreprise aux 600 000 élus nationaux, régionaux et locaux de notre pays.
- Formation professionnelle : créer un statut de “Salarié-Formateur”permettant à certains employés d’aménager leur temps de travail pour se consacrer en partie à la formation de leurs collègues. Encourager le “peer to peer learning” (apprentissage par les pairs) et le self-learning via des MOOC ou des SPOC
2/ Préserver la souveraineté de nos actifs et de nos compétences en France puis au niveau européen
Constat : l’hégémonie des grands acteurs de l’internet (les GAFA) ou de leur équivalent chinois (BATX : Baidu, Alibaba, Tencent et Xiaomi) dans l’économie numérique sont une menace pour l’indépendance de la France et de ses voisins européens. Cette situation risque à terme d’être préjudiciable pour l’économie de notre pays.
- Construire un cloud souverain : mettre en œuvre une solution informatique pour garder en France les données privées et publiques (citoyens, entreprises, administrations) puis, dans un deuxième temps, appliquer cette décision au niveau européen.
- Créer une agence européenne du numérique fondée sur trois objectifs : l’innovation disruptive, la régulation et le financement des champions de demain.
- Imposer les géants de l’internet sur la base de leur CA en France, pour impulser la création d’un marché unique du numérique en Europe
3/ Préparer le France à passer du stade de « start-up nation » à celui de « scale-up nation »
Constat : la France est en passe de devenir la 2e nation européenne en terme de création de start-ups. Ce dynamisme entrepreneurial tend à devenir un problème potentiel devant les offres financières de grands groupes ou de fonds d’investissement (essentiellement étrangers) auxquelles les entrepreneurs ont du mal à résister. Il est donc nécessaire de développer une culture de « licornes » avec des fonds français et/ou européens. Ces futures ETI sont les acteurs clés de l’économie française pour l’équilibre de la balance commerciale et la création d’emploi.
- Créer un fond souverain de 10 milliards d’euros dédié aux PME et ETI à forte croissance (futures licornes) susceptibles de lever entre 100 et 500M€ afin d’éviter leur rachat par des fonds d’investissement étrangers.
- Former les entrepreneurs à la culture du management à grande échelle avec une vision globale et encourager les programmes de mentorats internationaux.
- Encourager les partenariats avec les grands groupes disposant de structures de distribution internationale.
4/ Faciliter l'accès des PME au financement bancaire et au financement alternatif
Constat : l'accès au financement joue un rôle essentiel dans le succès des jeunes pousses. Le groupe du travail du B20 (SME Development) montre la forte corrélation entre croissance des PME et accès au financement. En France, 90% des investissements sont financés par la dette. Si le dispositif entourant les start-ups est satisfaisant il est important de développer des pistes pour les PME à forte croissance afin qu’elles puissent lever des fonds à hauteur de leurs ambitions et de la taille de leurs marchés internationaux.
- Réorienter une plus grande partie de l’épargne longue (notamment salariale et assurance-vie) vers l’économie réelle permettant aux entreprises de bénéficier de capitaux long terme (objectif 1% des dépôts consacrés au financement des PME à fort potentiel)
- Créer un "Crédit d'Impôt Fonds Propres" pour que les PME puissent affecter une partie de leurs résultats au renforcement de leurs fonds propres.
- Soutenir le développement des entreprises innovantes de moins de 8 ans en allégeant l’IS lors de l’affectation du bénéfice des exercices au report à nouveau.
- Simplifier les dispositifs d’aides (JEI/CII/CIR) en attribuant un label “entreprise innovante” unifié en France voire en Europe permettant de débloquer automatiquement les droits aux dispositifs en place sans avoir à créer de dossiers lourds et devoir avancer la trésorerie.
- Intégrer dans le rapport annuel des sociétés le critère des délais de paiement. Contraindre les commissaires aux comptes à ne pas certifier les comptes en cas de de non-respect (légal) du paiement à l’égard des TPE/PME.
5/ Harmoniser le droit des affaires, le code du travail et la fiscalité au sein de l’Union Européenne
Constat : le droit des affaires, le code du travail et la politique fiscale sont une mosaïque historique et un mille-feuille au sein des 28 pays qui freinent le développement des PME/ETI. A l’instar de l’OHADA (Organisation pour l'harmonisation en Afrique du droit des affaires qui regroupe 17 pays) les entrepreneurs français demandent la mise en place d’une organisation pan-européenne visant à la signature d’actes uniformes et qui constitueraient le futur socle juridique des sociétés commerciales.
- Harmonisation européenne des politiques fiscales (notamment la TVA et l’impôt sur les sociétés) en démarrant au niveau de l’assiette
- Harmonisation du code du travail en créant un contrat de travail européen type
- Harmonisation du droit des sociétés avec la rédaction d‘un acte uniformisant les règles de fonctionnement des sociétés commerciales (dispositions générales communes) ainsi que les formes de sociétés commerciales : SA, SARL, SNC, SCS…)